Comment reconstituer un bateau grec ?

Rares sont ceux qui l’ont vu naviguer. Plus nombreux en revanche sont ceux qui l’ont admiré lors de son exposition au musée de St-Romain-en-Gal au début de juin de cette année, lors du grand événement de reconstitution organisé pour les 14e Journées Gallo-Romaines. Nous voulons parler du bateau grec Gyptis, que nous avons rapidement mentionné dans un précédent article. Aujourd’hui, nous allons vous montrer comment ce projet expérimental a pu être mené à bien.

Le Gyptis est la réplique d’une barque antique de pêche. Avant de le lancer à la mer, on s’en doute, il a fallu du temps, beaucoup de temps : près de 20 ans de réflexion, d’études et de travaux. Ensuite, ce ne furent pas moins de 800 heures pour le construire, grâce à l’implication des chercheurs, des charpentiers, des étudiants et de tous les bénévoles qui se sont lancés passionnément dans l’aventure.

Cette aventure commence en 1993, lorsqu’une épave datant du VIe siècle avant J.-C. est découvert découverte place Jules-Verne à Marseille, lors des fouilles entreprise dans le port antique de Massalia. Son état exceptionnel de conservation fait penser qu’une reconstitution est envisageable à des fins expérimentales. C’est à d’abord à l’échelle 1/10e que le Gyptis voit le jour deux ans plus tard. La maquette mesure près d’un mètre de long.

Une fois que le plan et le montage sont bien compris, les chercheurs rassemblent les matériaux, à commencer par le bois de charpente, en pins d’Alep et chênes, sélectionnés en 2010 dans les forêts de Cadarache et de Gémenos, et débités ensuite aux formes voulues, stockées d’abord à l’air, puis séchées à l’étuve pour leur donner la courbure souhaitée.

Il faut attendre trois de plus pour que le montage commence enfin, en 2013, sous la direction de l’archéologue Patrice Pomey. Les premières pièces de la charpente sont assemblées dans les ateliers d’un chantier naval de Marseille. L’opération la plus difficile est l’ajustage, qui consiste à ployer ou vriller les bois après leur passage en étuve. Le bateau prend rapidement forme quand les bois sont assemblés pour former la coque, dont les différentes parties sont solidarisées avec 10 000 chevilles en bois.

Aucun clou ou vis n’est utilisé. Seules des coutures et des ligatures sont employés, comme nous l’apprennent les découvertes archéologiques. Ainsi, ce ne sont pas moins de 4,5 km de ligatures qui sont réalisées, avec du fil de lin. Peu à peu se dévoile un beau navire de près de 10 m de long, sur un peu moins de 2 de large.
Pour éviter que le Gyptis ne coule, sa coque est calfatée pour lui donner l’étanchéité requise, avec du goudron de Norvège à l’extérieur et de la cire d’abeille à l’intérieur. Enfin le bateau est peint, avec le célèbre oeil apotropaïque de chaque côté de la proue. Puis les gréements sont à leur tour reconstitués. Il ne reste plus qu’à le mettre à l’eau. C’est chose faite en octobre 2013 au large de Marseille. Commence alors une nouvelle phase expérimentale de navigation, le long de la côte et des anciens comptoirs massaliotes. Poséidon ne pouvait rêver mieux !

Photothèque CCJ/Christine DURAND

 

 

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