Des vétérans de Napoléon photographiés
Après les clichés assez spectaculaires sur l’attaque japonaise de Pearl-Harbor, voici une autre série de photos plus anciennes, issues de la collection de Mme Brown, témoignage aussi remarquable qu’émouvant de l’épopée napoléonienne. Ces hommes déjà âgés posent dans leur uniforme pour – apparamment – illustrer un livre paru à la fin du XIXe siècle (c’est du moins une version avancée), ce qui en dit long sur leur âge probable. Tous sont décorés de la médaille de St-Hélène, créée et donnée aux vétérans en 1857, ce qui suggère que ces photos datent au plus tôt du Second Empire.
ci-contre, le chasseur à cheval de la Garde Maire
Ci-dessus : Moret du 2e hussard, Ducel des mamelucks de la Garde, Verlinde du 2e régiment des lanciers de la Garde, Mauban du 8e dragon, Loria du 24e chasseur à cheval, Dupond du Ier hussard, Fabry du Ier hussard, Taria sergent des grenadiers, Vitry de la garde départementale.
Le connaisseur d’uniformes sera toutefois troublé par certains détails, tant sur les armes que les costumes. Toutes les pièces portées ici ne datent pas du Ier Empire, mais d’époques postérieures, notamment du Second-Empire. Pourquoi ce mélange ? Tout simplement peut-être parce que ces hommes n’avaient plus en leur possession leur uniforme complet. Il est assez fréquent que les militaires démobilisés recyclent certains habits pour une utilisation civile. En outre, en regardant ces photos, on voit que certains vétérans n’avaient plus la silhouette de leur 20 ans, et qu’ils ne pouvaient plus rentrer dans leur pantalon ou leur veste. Ces photos avec leur cachet d’authenticité indubitable trichent donc avec la réalité uniformologique, mais pas dans le but de tromper celui qui les regarde. Il s’agit d’un arrangement réalisé dans un but précis qui nous échappe en partie.
Ci-contre : Schimt du 2e régiment de chasseurs à cheval, Dreuze du 2e régiment de lanciers de la Garde, Delignon des chasseurs à cheval de la Garde, le grenadier Burg, le sergent Lefebre du 2e régiment du Génie.
On peut toutefois avancer une hypothèse, celle d’une commémoration. En effet, il était habituel que des vétérans de la Grande Armée se rendent devant la colonne Vendôme pour rendre hommage à leur empereur. Malgré l’âge, ils continuaient de porter tout ou partie de leur ancien uniforme pour revivre un instant cette gloire connue à ses côtés. On en veut pour preuve une peinture du célébère illustrateur historique Job, qui montre justement quelques-uns de ces vétérans devant le monument parisien. Il n’est d’ailleurs pas impossible que ces photos aient été réalisées pour servir de modèle au peintre. Ainsi faisait Edouard Detaille en faisant poser des personnes dans des uniformes proches, qu’il retouchait ensuite pour les conformer à la réalité. Nous avons conservé un certain nombre de documents qui nous montrent clairement cette façon de faire, rendue possible grâce à la photographie. Il est intéressant en effet de voir que ces vétérans déssinés par Job, que regarde passer un zouave du Second-Empire, portent pour la plupart les uniformes visibles sur les photos de ces vétérans.
