La traîtrise du summa rudis ?

Et si, une fois n’est pas coutume, nous nous intéressions à une toute petite anecdote de l’Histoire ? Une de celles qui passent inapercues au premier regard, mais qui en disent long quand on sait y prêter attention… La scène se passe en Asie Mineure, à l’apogée de l’Empire romain, dans une arène…

Cette histoire nous est contée par une simple pierre tombale, représentant un gladiateur au sol, demandant sa grâce en tendant une main vers le haut, dominé par son adversaire, qui tient quant à lui deux glaives. Les équipements sont similaires, avec un pectoral et une jambière, ce qui fait tout de suite penser à une paire de provocatores. Plus de casque à ce stade, ils sont un peu plus loin sur le sol.

Rien que de très banal, me direz vous… Mais c’est le texte de cette pierre tombale qui, lui, est fort peu commun. Le gladiateur mort se nomme Diodore, et son épitaphe dit « Après avoir vaincu mon adversaire, Demetrius, je ne l’ai pas tué immédiatement. Le destin et la trahison du  Summa Rudis m’ont tué ». Que s’est il donc passé, et qu’a donc fait le Summa Rudis, qui n’est autre que l’arbitre du combat ?

D’après Michaël Carter, historien et universitaire canadien spécialiste de la gladiature, le scénario est clair. Diodore a vaincu Demétrius, et c’est cette victoire que la pierre tombale montre : le combattant tenant les deux armes est Diodore, et celui qui est au sol est Demétrius. Hélas pour le vainqueur, une des rare règles concernant la gladiature que nous connaissons est que lorsque un adversaire tombe au sol de lui même, l’arbitre l’autorise à reprendre le combat. Et c’est ce qui se serait passé dans ce cas : le Summa Rudis – l’arbitre – a mal interprété la présence de Demetrius au sol, et l’a autorisé à reprendre le combat.

La suite, vous la connaissez : Diodore en est mort. Ses amis, outrés par cette erreur d’arbitrage, ont ajouté cette petite phrase assassine sur l’épitaphe, parlant de la mortelle traîtrise de l’arbitre. Peut-être celui-ci avait-il estimé que le combat était trop court (Demetrius ne semble pas blessé), peut être avait-il d’autres motifs…

Finalement, vive l’arbitrage vidéo, et merci au passage à Pax Augusta et Ars Dimicandi pour les photos qui illustrent cet article.

 

 

 

 

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