La transformation du mousqueton 1777 en modèle 1786 (suite et fin)

Voyons aujourd’hui la suite de notre article consacré à la transformation d’une pièce du commerce (le mousqueton 1777 de la société ARMAE.COM) en mousqueton de hussard, version 1786. Merci à notre ami Laurent Lafont de nous faire partager ses connaissances historiques et techniques.

La baguette

La baguette, une fois glissée dans le canon devrait dépasser de 4 lignes pour un fusil et de 3 lignes 6 points (7,9 mm) pour un mousqueton. La tête était de forme tronconique.

La baguette fournie avec la réplique, si elle fait la bonne longueur pour un mousqueton de grosse cavalerie, ne ressemble pas à grand-chose et après avoir raccourci le canon, la baguette s’en retrouve trop longue de 75 mm.

On peut aisément couper une partie de la tête et la reprendre à la lime pour lui donner une forme tronconique. Ce qui raccourci la baguette de 10 mm environ. Il faudra encore couper l’autre extrémité pour l’amener à une longueur finie d’environ 701 mm. Extrémité qu’on pourra fileter, si on a les outils adéquats.

Les garnitures

Le mousqueton 1786 ne disposait pas de bretelles. Il convient donc de supprimer les pièces liées à la bretelle de suspension.

La sous garde

On meule donc le pivot de battant de sous garde.

Normalement l’écusson du 1777 comporte 2 vis à bois encadrant le pivot de battant. Sur la réplique, il y en a qu’une. Mais cela tombe bien, sur le 1786, il n’y en avait qu’une également. Donc on n’a rien à faire sur ce point. On démontera cependant le pontet et l’écusson (avec la détente) pour faciliter la suite du travail (voir le chapitre sur le percement du canal de baguette).

La grenadière et la tringle

On meule également le pivot de battant de la grenadière. On découpe le bec que forme la grenadière du 1777 à l’avant, pour obtenir un anneau simple de largeur constante. On coupe la bague entre les extrémités en rosette. La vis de la tringle serre de cette façon la grenadière sur le fusil.

La tringle est identique à celle du 1777. Il n’y a donc rien à faire de particulier.

L’embouchoir

L’embouchoir du 1786 n’a rien à voir avec celui du 1777 An IX. Cependant on peut le transformer en lui soudant une pièce de laiton pour lui confectionner un long bec. L’embouchoir fini avec son bec fait 5 pouces 1 ligne 6 points (138,7 mm).

On peut également en acheter un brut de fonte (comme chez CARTRY par exemple). Il y aura un gros travail à la lime à faire, y compris à l’intérieur de la pièce pour faciliter le passage de la baguette.

Si l’on souhaite un 1786 modifié An IX, on gardera le guidon de mire sur l’embouchoir. Autrement, il faudra le limer et en confectionner un en fer pour le braser sur le canon à 2 pouces 8 lignes de la bouche (72,2 mm). On sera alors dans une configuration 1786 Ancien Régime.

La plaque de couche.

On aura besoin de la démonter lors du percement du canal de baguette.

La platine et le porte vis

La platine du 1786 reprenait celle du 1777 et celle du 1786 An IX était modifiée An IX, c’est-à-dire sans retroussis de batterie. Il n’y a donc rien à faire de particulier.

La platine de la réplique est un peu trop forte d’environ 7mm. Mais il n’y a pas grand-chose à faire pour remédier à cela.

Sur une précédente réplique, le ressort de batterie était un peu court. Sur celui, objet de la transformation, il est irréprochable.

Par contre, le bassinet mérite d’être un peu plus creusé. Les extrémités des vis de la bride de noix et du ressort de gâchette que l’on voit à l’arrière du chien nécessitent un coup de lime pour les arrondir, ainsi que les grandes vis de platine.

Le bois

Le bois se termine à 14 pouces 6 lignes de la bouche du canon (392,5mm). On se sert donc du canon fini et positionné pour couper le bois à la bonne longueur.

On peut alors penser à décaper le verni pour mettre le bois à nu.

On retravaillera l’extrémité pour l’adapter à l’embouchoir. Ce qui s’avère être une tâche qui demande beaucoup d’attention. On dégagera également, l’amorce du canal de baguette dont l’angle se trouve modifiée par le déplacement de l’embouchoir.

Au niveau de la crosse, il n’y a rien à faire. Ses dimensions, sa forme (absence de joue) et sa pente, si elles présentent de petits défauts par rapport à un 1777, sont idéales pour un 1786.

Le canal de baguette

C’est le point le plus délicat de la transformation et celui qui demandera le plus d’attention :

Sur la réplique, la baguette bute sur un taquet placé à l’intérieur de l’écusson que l’on a démonté précédemment.

La baguette du 1786 traverse toute la crosse pour venir buter, elle, sur la plaque de couche.

Cela nécessite donc de creuser un canal de diamètre 6 mm sur 700 mm de profondeur en évitant les vis de fixation de la platine, la vis de la queue de culasse le mécanisme intérieur de la platine et la détente avec sa goupille…

Les mèches bois que l’on peut trouver dans le commerce font au maximum 400mm de longueur. Les rallonges ne sont pas d’un grand secours car leur diamètre est trop important. On peut essayer de souder une tige à la mèche, mais cela nuirait à la précision du perçage. Il faut donc envisager de percer le canal par les deux bouts en espérant que les 2 canaux vont se rejoindre au niveau du puits de détente qui est légèrement excentré.

Une fois terminé, il convient de supprimer en partie le taquet se situant à l’intérieur de l’écusson et qui sert de buttée à la baguette du 1777. Il faut également que les différents ergots ou renfort de l’écusson ne bride pas la baguette et éventuellement les éliminer à la lime.

Marquages et finitions

Si l’on souhaite finasser, on peut détailler les marquages.

Marquages des parties métalliques

La platine de la présente réplique est marquée « Manufacture Impériale de St Etienne ». Sur un précédent modèle, il y avait « Manufacture Royale de Mutzig » ce qui était relativement surprenant, comme choix pour un mousqueton 1777 An IX. La production d’arme à feu de la manufacture de Mutzig était relativement limitée et le terme de Royale lié à un An IX impliquait l’année de fabrication 1814 (pendant la première restauration).

Si on veut être puriste, on est tout de même embêté. En effet, il semblerait que la manufacture de St Etienne n’ait fabriqué des mousquetons de hussards que sous l’Ancien Régime. La production de 1786 modifié An IX s’étant, elle, faite exclusivement à Maubeuge.

Comme l’objet de la transformation n’est pas de faire une copie, mais juste une réplique, je me bornerai à frapper mes initiales en guise de poinçon de contrôleur.

Par contre on peut rajouter les éléments généraux suivants :

  • Sur la queue de culasse le modèle 1786 (on notera à cette occasion que la vis de queue de culasse est placée un peu trop en avant de 5mm, elle devrait être à 36,1mm du bout du canon).
  • Sur le canon « 1813 » pour l’année de fabrication
  • Sur le canon, le régime du gouvernement «  EF » pour Empire Français

 

Marquage du bois

Le macaron figure au centre du côté droit de la crosse Il est circulaire avec un diamètre de 2,7 centimètres. La partie centrale est occupée par une carotte de buis elle-même au diamètre de 1,3 centimètres au centre de laquelle figure le régime du gouvernement «  EF »  La couronne extérieure est partagée en quatre quartiers dans lesquels on a, à partir du et en tournant dans le sens des aiguilles d’une montre, tout d’abord l’année de fabrication1813, ensuite, dans un second compartiment, la lettre P, puis dans un troisième un C. Le quatrième est enfin, occupé par le mois de la construction.

Finitions

Je ne saurai dire précisément l’essence du bois utilisé pour la fabrication de la réplique. Il semblerait peut-être que cela soit de l’acajou d’Amérique d’une belle facture pour une réplique.

Une fois le vernis décapé, on pourra donc le traiter à la cire ou à l’huile de lin.

 

Les parties métalliques seront passées au rouillant (solution saline ou produit du commerce) pour leur ôter l’aspect trop poli miroir. On essayera également d’adoucir les angles de ces pièces au cours du nettoyage de la couche d’oxyde obtenue. On n’oubliera pas de stopper l’action du rouillant par l’application d’une huile pour arme.

Les extrémités des vis mériteront d’être limées pour leur donner un meilleur aspect quand elles sont visibles comme sur la platine.

Les parties en laiton peuvent manquer d’un peu de finesse et devrait être un peu adoucies.

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