Reconstitution d’un sanctuaire gaulois « de campagne », avec casques et carnyx

Il y a un peu plus d’une dizaine d’années, lors de fouilles d’un sanctuaire gallo-romain en Corrèze (à Tintignac, situé à Naves, à 10 km au nord de Tulle, une découverte unique fut réalisée sous un temple protohistorique, dans une petite fosse d’environ 1,10m de côté. Ce que l’équipe d’archéologues conduite par Christophe Maniquet s’apprêtait à mettre au jour allait être une avancée énorme dans la connaissance des Celtes. Ce dépôt contenait notamment plusieurs casques spectaculaires et trois exemplaires d’un instrument aussi rare que mystérieux : le carnyx. Le mobilier de ce dépôt a été aujourd’hui en partie reconstitué par la troupe gauloise Branno Teuta, grâce au talent de notre ami Franck Matthieu, et il est mis en scène pour évoquer un sanctuaire gaulois.

A l’occasion de son dixième anniversaire, la troupe de reconstitution Branno Teuta nous propose aujourd’hui le fruit de deux années de travail : d’investigation, de recoupement, de tri des informations et d’études des sources documentaires. Il ne prétend pas détenir une vérité, mais souhaite partager ses réflexions sur le rôle des carnyx dans la société protohistorique. Grâce à la découverte du dépôt sur le site Tintignac, nous connaissons désormais la constitution des carnyx à près de 80%, et, chose importante, nous savons désormais comment étaient les embouchures.

Les analyses et les différentes reconstitutions réalisées nous donnent une vision plus cohérente de ces instruments. Mais plusieurs zones d’ombres existent encore et notamment leur rôle dans le domaine militaire mais aussi cultuel, que tentent d’éclairer Branno Teuta qui pense que ces instruments ont un véritable rôle stratégique au cours du déroulement d’une bataille. Il s’interroge aussi sur la façon dont ces objets ont été fabriqués, leur signification symbolique et leurs rôles dans la vie des Gaulois.

Comme le groupe n’a pas la possibilité de reconstituer tous les objets de la fosse, son choix s’est porté sur les deux casques singuliers que sont le modèle à l’oiseau et le modèle aux anneaux. Le carnyx au pavillon en sanglier à grandes oreilles et le carnyx serpent, bien que seuls des fragments de ce derniers aint été retrouvés,
complètent l’ensemble.

Le casque oiseau a fait l’objet d’un étude approfondie par C. Maniquet. La quantité d’informations est donc importante, ce qui facilite le travail de reconstitution. Avant celle-ci, aucune réalisation n’existait à ce jour. Le timbre est formé d’un seul tenant avec la queue, la couronne est une bande de laiton soudée pour la fermer puis soudée au timbre comme sur l’original. Le cou est formé par 3 éléments : deux demi coques plus la tête. La jonctions des éléments sont effectuées aux mêmes emplacements que sur l’original. Un seul type de laiton est utilisé, alors que l’original présente deux types d’alliage cuivreux. La copie a été peinte.

Le casque à anneaux. Son aspect très atypique et impressionnant en fait une pièce unique. Nous n’avons que peu d’informations techniques mais nous connaissons ses dimensions. Chaque anneau est bivalve leur donnant un profil lenticulaire et le couvre nuque est rapporté sur le timbre. Enfn les anneaux sont soudés entre eux et sur le timbre à l’étain.

Le carnyx à pavillon de sanglier aux grandes oreilles. La pièce originale est composée de tôles martelées et de pièces coulées. Six types d’alliage cuivreux ont été utilisés. Les tôles
composent la majeure partie du carnyx : le pavillon, les oreilles et les tubes. Les pièces coulées sont les éléments de jointure et l’embouchure. Des yeux ont été réalisés à partir d’un alliage de plomb pour le blanc et de la lignite pour la pupille. La copie quant à elle est entièrement réalisée en laiton. La lignite étant le matériau le plus diffcile à obtenir, il est remplacé par une pâte à base de charbon de bois.

Le carnyx à tête de serpent. L’artefact est réalisé uniquement en tôles d’alliage cuivreux assemblées par des rivets. Des trous de rivetage sont présents sur la tête, laissant présager l’existence d’une pièce supplémentaire qui n’a pas été retrouvée. On peut supposer que cette pièce représentait des cornes de bélier. Le serpent à tête de bélier est en effet un animal souvent fguré dans la mythologie Laténienne. La copie est aussi réalisée en laiton. Branno Teuta a choisi de ne pas représenter les cornes de bélier afn d’éviter toute fausse interprétation. Mais il est envisageable de les ajouter par la suite.

L’autel. Suite à ces observations et ces hypothèses, il a été décidé de réaliser une construction légère en bois, transportable, de campagne, permettant d’abriter ces objets « sacrés » comme le faisaient les armées romaines avec les enseignes de légions. Nous l’appelerons « l’autel des carnyx ». La petite structure de 150 cm de côté pour une hauteur de 220-230 cm est construite selon des modèles de bâtiments laténiens des oppida de Corent et du Titelberg (dessin ci-contre). La technique de construction choisie est inspirée des techniques architecturales de l’époque à savoir le travail d’assemblage du bois en tenons et mortaise.

 

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