Un jardin romain reconstitué, Caumont sur Durance

Toutes les riches villae romaines qui parsemaient la campagne de la Gaule associaient un demeure aristocratique à une exploitation agricole. Comme par la suite, le jardin faisait partie intégrante de la demeure du maître. Si sa vocation était à la fois l’agrément et de marquer le statut social de son propriétaire, son origine utilitaire était toutefois rappelée par des zones dédiées aux cultures fruitières ou maraîchères.

Si de nombreuses villae ont été identifiées et fouillées en France, rares sont les cas où le jardin d’agrément a pu être identifié de manière certaine. Le site de Caumont sur Durance, non loin d’Avignon, fait figure d’exception. Non seulement l’emplacement du jardin a pu être retrouvé lors des fouilles de 1999/2000, mais il présente de plus la particularité d’être doté d’un bassin monumental, le plus grand jamais retrouvé en Gaule à ce jour : 65m de long, pour 3.20m de large et 1.20m de profondeur. Son sol est décoré de plus de 50.000 briquettes d’argiles, cuites à des températures différentes pour obtenir des couleurs variées, et scellées en opus spicatum (en chevrons). Dans un monde méditerannéen où l’eau est symbole de richesse, une telle installation indique clairement une famille parmi les plus aisées de narbonnaise.

Les dimensions du jardin en lui même, sur trois terrasses, sont exceptionnelles : 1.2ha pour la partie fouillée, plus de 2ha en tout. En descendant les différentes volées de marches reliant les niveaux entre eux, le maître de maison finissait par amener ses visiteurs au bassin, dans une perspective somptueuse donnant sur les Alpilles.

L’importance et l’intérêt des vestiges a naturellement conduit la municipalité à décider de valoriser largement le site, en recréant ce qu’aurait pu être ce jardin à l’époque de la splendeur de la villa, sous le règne de l’empereur Auguste. Actuellement, la végétation du site est peu connue, mais les fouilles ont tout de même pu permettre d’identifier des rangées de vignes et d’arbres fruitiers. Le paysage qui s’offre aujourd’hui aux visiteurs est donc une évocation plus qu’une reconstitution, imaginée sur la base des exemples des jardins de Pompéi, complétée par une abondante documentation sur le sujet.

Le site est décomposé en plusieurs espaces, qui constituent autant de sous ensembles homogènes, ou de jardins dans le jardin. L’un d’entre eux est dédié à Flore, déesse tutélaire des fleurs, avec de nombreux iris, bleuets, et autres plantes fleuries. Un autre est dédié à Jupiter, avec un chêne impressionnant, encore un Apollon, avec des essences plus aromatiques, un autre planté d’oliviers à Minerve.

Des zones sont consacrées à Cérès, ensemencées en céréales, à Bacchus, avec de nombreuses vignes sur treille, un verger et un potager sont également présents, et le jardin se termine par un bois sacré évoquant celui de Diane. Chaque enclos est délimité par des panneaux en lattis de bois, conformément aux représentations iconographiques parvenues jusqu’à nous.

Ce site constitue un voyage merveilleux et évocateur dans le passé, et nous permet vraiment d’imaginer ce qu’étaient ces fameux hortus romains. Si vous passez par Caumont… arrêtez vous, vous ne le regretterez pas !