Embuscade en bord de Seine, il y a plus de 3000 ans
C’est une bien curieuse découverte qui vient d’être faite par les archéologues de l’INRAP, sur le site d’Alizay, en Haute-Normandie. Un demi-millier de balles de fronde ont en effet été retrouvées dans le fond d’un petit chenal du fleuve, faisant office de guet. L’hypothèse du dépôt de munitions perdu au cours du passage a été abandonnée, et c’est plutôt celle d’un combat violent qui est aujourd’hui privilégiée.
En effet, ces balles de fronde ne sont pas concentrées sur un même endroit, comme si elles avaient toutes roulées ensemble. Elles étaient au contraire réparties non seulement au fond du chenal, mais aussi sur les deux berges. En outre, certaines présentaient les traces d’utilisation : quelques-unes étaient enfoncées dans la terre, d’autres avaient des marques d’impact ou avaient explosées sur des pierres. Ces balles de fronde étaient fabriquées en craie et pesaient environ 70 grammes chacune.
Il ne peut s’agir des traces d’une chasse, car aucun animal terrestre ne nécessite une telle débauche de munitions. C’est donc bien d’une embuscade qu’il s’agit, qui eut lieu sans doute à l’âge du bronze, où sont connues les premières traces de conflits d’importance, comme le révèlent notamment les fouilles menées depuis 2008 dans la vallée de la rivière Tollense, au nord-est de l’Allemagne, où les restes de 120 individus et quantités d’armes en bronze, pierre et bois ont été retrouvés. Cette bataille très importante pour l’époque est sans doute le résultat d’une invasion de la région par une population venue de Pologne.
A Alizay, les archéologues formulent l’hypothèse que ce guet, ainsi qu’un second distant d’une centaine de mètres, où ont été découvertes également de nombreuses balles de fronde, était un lieu idéal pour tendre une embuscade à des groupes qui tentaient la traversée et qui étaient vulnérables à cet endroit. Conflit social comme pensent certains, ou brigandage pour voler les trésors des voyageurs ? Rien ne permet de le dire.
Il faut souligner les effets meurtriers des frondes, que l’on sous-estime souvent, faute de n’en avoir jamais vues en action. C’est une arme très facile à fabriquer, en cuir en en fibres végétales. Les munitions peuvent être en terre cuite, en pierre (de simples galets ramassés suffisent) ou en plomb plus tard. Le mouvement rotatif du bras lui imprime une vitesse prodigieuse, et c’est à 30-40 mètres par seconde en moyenne que la balle atteint sa cible, causant des dégâts irréparables. Certaines populations dans l’Antiquité était réputées pour leur adresse à la fronde, comme aux Baléares.
Ces vidéos vous permettront de vous faire une idée. Notez le bruit…