Le cingulum et les ceintures, une bien drôle d’histoire !

Tout le monde connait la silhouette caractéristique du légionnaire romain classique, arborant toujours fièrement un cingulum de cuir clouté à sa ceinture. Pour autant… tel n’a pas toujours été le cas, tel ne sera pas toujours le cas… Mais alors, à quoi sert donc ce tablier, et pourquoi est-il là ?

A l’époque de César, le légionnaire porte une simple ceinture de cuir, qui permet tout d’abord de reporter une partie du poids de la cotte de maille sur les hanches, et donc de soulager les épaules. Le gladius hispaniensis est une arme relativement longue, et se porte souvent accroché à un baudrier qui passe sur l’épaule. Cette ceinture passe sur le baudrier, bloquant ainsi celui-ci et permettant de sortir facilement l’arme de son fourreau.

A cette époque, certains combattants ont pris l’habitude de séparer l’extrémité de leur ceinture en plusieurs lanières, qui retombent donc sur le devant. Un seul brin est troué, mais tous sont équipés, à leurs extrémités, de mordants métalliques qui s’entrechoquent quand le combattant marche. Il est extrêmement plausible que ce soit le développement de cette mode qui conduise au cingulum classique (voir le centurion ci-contre pour visualiser ce type de ceinture).

A partir du règne d’Auguste, le cingulum est généralisé. Ces lanières de cuir sont fixées sur la ceinture du combattant, et sont au nombre de six ou huit. Il ne s’agit pas d’une protection, qui est toute relative, mais bien d’un accessoire qui marque l’appartenance du porteur à l’armée. Jamais le légionnaire ou l’auxiliaire ne se départira de son cingulum – tout de même peu pratique lorsque l’on creuse un retranchement – au point que le priver de cet accessoire sera même une punition en vigueur au haut-empire. Ces lanières sont décorées de pièces métalliques, et se terminent par des pendentifs parfois complexes.

Les ceintures et le cingulum sont richement décorés, d’appliques métalliques argentées, niellées ou émaillées, et certaines pièces sont de véritables travaux d’orfèvre, qui coûtent une petite fortune. Le légionnaire est riche, et il le montre bien. La ceinture qui tient le cingulum est également celle qui supporte le pugio, attaché à deux petits disques articulés, sur le côté. Et le glaive, direz vous ? Et bien il se porte désormais attaché à une seconde ceinture, croisée sur les hanches. Il est plus court qu’à l’époque césarienne, et se tire plus aisément. Avec l’apparition des armures segmentées, le baudrier reviendra en force, la ceinture tendant à glisser sur l’armure, conique, sous le poids du glaive.

En avançant dans le premier siècle, le nombre de lanières du cingulum va diminuer, passant plutôt à quatre – notez que le nombre est toujours pair. Au second siècle, la spatha remplace progressivement le glaive, et va aller s’allongeant. On va donc retourner au couple ceinture-baudrier pour tenir l’arme, mais le cingulum va disparaitre. Au troisième siècle, plus de trace de ce tablier si symbolique pour les légionnaires et auxiliaires du premier siècle.

L’archéologie nous livre de très nombreux vestiges de ces ceintures et tabliers, ce qui permet aux reconstituteurs modernes d’arborer de bien belles pièces, comme la ceinture de Tekija,  ou en réalisant eux mêmes leurs décorations. Les modèles de boucles sont multiples, et un vrai choix s’offre au passionné !

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