« Le plus vieux soldat de France »

La semaine dernière, nous avons évoqué la vie héroïque d’un grand Ancien, le soldat Albert Roche, surnommé « le premier soldat de France ». Il était natif de la Drôme. Aujourd’hui nous allons vous parler d’un Bourguignon, du nom de Jean Thurel, que l’on pourrait appeler « le plus vieux soldat de France ». Il était né sous le règne de Louis XIV, et il mourût sous celui de Napoléon. Il connu une carrière militaire de 75 ans.

Né en 1698, issu lui aussi d’un milieu fort modeste, il s’engage au régiment de Touraine un an après la mort du Roi Soleil, en 1716. Il est affecté à la compagnie des fusiliers. Il va y demeurer toute sa carrière, exception faite de quelques années passées au sein du régiment des dragons de Bauffremont et au régiment d’Anjou-Cavalerie.

Durant le règne de Louis XV, il est au siège de Kehl en 1733 où il est sérieusement blessé (guerre de Succession de Pologne), puis il participe à la bataille de Fontenoy en 1745 durant laquelle trois de ses frères sont tués. En 1759 il participe à la bataille de Minden, où son régiment déploie des trésors de courage, mais paie un tribut très lourd. Lui-même reçoit huit coups de sabres, dont sept à la tête… à 60 ans passés.

Puis il accompagne Lafayette en Amérique pour aider les insurgents, et combat à la bataille de Yorktown en 1781 avec l’un de ses fils. Un quatrième frère est tué à son tour. Le 16 décembre 1783, Jean Thurel est récompensé d’une marque de vétérance, puis d’une seconde en 1786 (il a 88 ans). L’année suivante, il est même présenté au roi Louis XVI, qui l’appelle affectueusement « papa » et lui propose la décoration de l’ordre de St-Louis ou une troisième marque de vétérance. Il choisit cette dernière à condition que ce soit le roi qui la lui épingle : cérémonie qui a lieu à Renne au début de 1788.

Plusieurs portraits sont faits de lui à cette époque, notamment celui montré ci-contre, exécuté par Antoine Vestier (musée de Tours). A côté des trois marques de vétérance, on y voit aussi la Légion d’Honneur. Le peintre a en effet retouché son tableau en 1804 pour ajouter cette décoration. La révolution le célèbre, et il est bien pensionné, mais il est mis à la retraite le 29 janvier 1792. A 90 ans passé, il se retire à Tours.

En 1801, sous le Consulat sont créées les compagnies de vétérans. Qu’à cela ne tienne, il s’engage de nouveau… à 103 ans. Il reçoit l’équipement et la solde, mais il ne fait pas campagne. Bonaparte augmente sa pension et lui remet la Légion d’Honneur en 1804. Il meurt quatre ans plus tard, mais en pleine possession de ses moyens intellectuels et physiques, à 108 ans.

 

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