Tintin fait de la reconstitution

Pour ceux qui ont un certain âge, cet article évoquera des souvenirs. Il fut un temps, pas si lointain, ou les enfants (les garçons particulièrement) aimaient collectionner les images. Nous achetions chez les buralistes des pochettes de vignettes autocollantes pour compléter des albums (Panini pour les plus connus) sur des sujets les plus divers : les dinosaures par exemple, ou les joueurs de foot, équipe par équipe. Nous avions beaucoup de « doubles », et nous nous les échangions dans la cour de récréation. Ce « loisir » ne date pas d’hier, car savez vous qu’il était très en vogue après guerre : la chasse aux fauves, les curiosités des régions françaises, sur la piste des indiens, etc. Dans le lot de ces chromographies publicitaires, il y avait aussi Tintin qui voyageait dans le temps.

Ces albums étaient édités par les éditions Dargaug, dans la collection « Voir et savoir ». A l’intérieur, des images dessinées par Hergé nous présentaient différents moyens de locomotion. Il y avait un album (un véritable livre en fait, avec une belle couverture rigide) consacré aux voitures (1953), un autre aux bateaux (1954), et un autre encore aux avions (1953). Ce dernier n’était dédié qu’aux avions de la deuxième Guerre Mondiale. Plus tard, il y eut une suite sur les origine de l’aviation, une suite pour la marine (à partir de 1700) et un volume sur l’aérostation.

Chaque volume était soigneusement présenté, avec un historique général en introduction, et pour chaque page (pour chaque machine) un texte explicatif détaillé. Il y avait 60 images dans chaque album… mais encore fallait-il les trouver. Elles étaient proposés par le journal de Tintin, mais aussi par tout un ensemble de marques des plus diverses, allant des chocolats Poulain, aux levures Alsa, ou aux biscottes Heudebert, pour ne citer que quelques marques encore connues.

A côté de chaque avion, voiture ou bateau, Tintin et Milou étaient dessinés dans des positions les plus diverses, souvent comiques. Chaque attitude ou accessoire permettait de raconter une petite histoire d’un seul coup d’oeil, en relation ou non avec l’historique de la machine. C’est ainsi que Tintin devenait tout à tour un personnage célèbre ou un anonyme, un soldat ou un civil, un jeune-homme ou un vieillard, il étaiot maigre ou gros. Il était français, allemand, britannique, italien, ottoman, etc., montré dans des costumes ou uniformes chamarrés et d’une grande justesse.

Du moins sur les époques les plus récentes et les mieux documentées. Pour ce qui est de Tintin légionnaire romain, ou viking, les connaisseurs auraient à redire sans aucun doute. Mais qu’importe, on voyageait à travers le temps de manière ludique et instructive, comme on savait si bien le faire autrefois. Dans le volume sur la seconde guerre, notre héros était parfois montré sous des uniformes ennemis : japonais ou allemand. Il existe ainsi une image de Tintin dans les jeunesses hitlérienne ou en kamikaze…

En introduction du volume en question, destiné à l’éducation des jeunes générations, il était précisé toutefois ceci : « Ne faites pas trop attention si, sur les vignettes où il apparaît ici, Tintin porte des uniformes divers. La couleur de la tunique n’a qu’une valeur documentaire. Ce qui compte, c’est le coeur qui est à l’intérieur. Et le coeur bat en l’honneur de tous les courages, pour la paix entre les hommes. » Bref, de petits bijoux pour les tintinophiles, mais aussi pour les passionnés d’Histoire et de reconstitution historiques.

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